Sélection de thématiques spécifiques traitées ces derniers mois; rédigées sous forme de chroniques régulièrement complétées afin d'éviter les renvois à des publications antérieures.
Les docteurs Knock et Coué : les pères fondateurs du marketing en stations de montagne.
« Tout bien portant est un malade qui s’ignore ! »
(Nota bene : ceci est un clin d’œil à tous les acteurs qui tentent de construire des stratégies viables et pérennes dans un contexte où la vision est souvent limitée au bout des spatules, coincée dans la poulie ou engluée dans le béton…
liste malheureusement non exhaustive).
Publié le 19 décembre 2021 18h10
En montagne, depuis les années 60, Le Skieur est l’animal unique, central et ultime…
Mais qui ne se conçoit pour certains qu’en troupeaux.
Pas tant sur les pistes, même s’il génère des logiques d’aménagements en termes de gestion de flux, pour « optimiser » le débit des remontées mécaniques, permettre une occupation de l’entièreté du domaine skiable, qui se doit d’être « le plus grand du monde », et remplir les hébergements qui font le bonheur des promoteurs depuis le Plan Neige… ; mais aussi, et surtout, pour montrer que la montagne en hiver est une industrie qui compte.
Pour compter, elle compte.
Elle compte les clients, les forfaits, les nuitées, les DSP, les appareils de remontées mécaniques, les kilomètres de pistes, le nombre de pistes, les litres de vin chaud…
Elle compte peser sur les décisions locales et gouvernementales pour préserver ses activités et son business. Ce qui est parfaitement logique[1].
Pour cela, elle utilise les « canons » de la communication n’hésitant pas à travestir la réalité et faire prendre les vessies pour des lanternes tout en construisant des légendes montagnardes.
Les chiffres étant synonymes de vérité absolue on les empile pour en faire la doxa professionnelle attestant de l’intégration au « milieu ». Et même si les données officielles depuis plus de 20 ans annoncent que seulement 9% de la population française part à la montagne l’hiver[2], certains continuent de raconter de belles fables chaque année en s’appuyant sur des études dont les résultats sont interprétés de manières ultra favorables pour ne pas désespérer les acteurs de la montagne[3]… et leurs financeurs.
Les études de 2021 ne dérogent pas à la règle, où l’on confond allègrement répondants aux enquêtes et français… mais comme l’étude est réalisée avec la méthode des quotas, c’est donc une vision juste…
« 🔵⚪🔴Bonne nouvelle : les Français sont déterminés à partir à la montagne cet hiver ! 🔵⚪🔴 Découvrez sans plus attendre les résultats de notre étude Kantar, sous forme d’infographie, pour mieux comprendre les intentions des français quant à leurs vacances d’hiver. 🏔️ - 41% des français ont l’intention de partir à la montagne cet hiver - 27% ont l’habitude d’y aller et sont donc des intentionnistes réguliers - 59% des français plébiscitent la montagne pour profiter de l’air frais - 54% des intentionnistes ont déjà réservé leur séjour ☃️ Ce qu’il faut retenir : 29% des intentionnistes n’ont pas encore réservé leur séjour ! ⛷️
Mais ils ne sont pas les seuls à utiliser des études pseudo quantitatives (* étude réalisée par l’institut IPSOS auprès d’un panel de 3000 personnes, âgées de 16 à 75 ans, issues d’un échantillon national représentatif de la population résidant en France) pour présenter leur vision même si elle est «légèrement » maquillée.
Chambéry (Savoie), le 29 septembre 2021.
« Le ski, une activité déjà pratiquée par près de deux tiers des Français
Près d’1 Français sur 2 (46%) est skieur, et 1 Français sur 5 est un skieur régulier (chaque hiver, une à plusieurs fois). Une large majorité des Français (65%) sait skier ou a essayé le ski à un moment dans sa vie. »
En racontant ces fables depuis plusieurs décennies désormais, certains acteurs, en ayant comme principale source d’informations leurs propres données tronquées, ont bâti des raisonnements obsolètes qui se heurtent aux conséquences inattendues de la pandémie[5].
Il y a trop de lits et 50% d’entre eux sont froids[6]… on continue de construire.
Les français viennent moins à la montagne l’hiver, on va chercher des volumes à l’étranger. Et certains rêvent encore de cohortes entières de chinois[7]. Le piège à devises restant le fondement économique du modèle depuis le Plan Neige, comme quoi le recyclage est une stratégie durable en montagne.
Les clients sont de moins en moins nombreux, on va pousser à la montée en gamme des hébergements pour maintenir les chiffres d’affaires pour une économie qui reste organisée sur 5 mois[8]…
Et puis… 17 décembre 2021 limitation de l’accès au territoire français aux voisins britanniques, première clientèle étrangère pour les montagnes françaises…
Il faut des aides… et des changements clients pour dans 15 jours …
Jean Baptiste Lemoyne
Ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie, et auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des PME
« on va réorienter nos campagnes de promotions du marché britannique sur le marché national… le sujet c’est le mois de janvier … que les français fassent le choix de cet hiver Bleu Blanc Rouge»
Les clients français vont venir en masse ? En janvier ?
On va aussi changer les dates des vacances scolaires, repousser la rentrée scolaire de janvier ou proposer un grand confinement dans les stations ?
On a déjà modifié les dates en raison des Mondiaux de Ski Alpin à Courchevel et Méribel[9].
Encouragés depuis des années à maintenir le cap tel le Titanic par manque de vision[10], et d’absence de remise en cause (Anticiper le changement climatique dans les stations de ski pyrénéennes : la science, le déni, l’autorité)[11], soutenus par certains opérateurs de l’Etat jusque dans leurs erreurs coûtant très cher à la puissance publique[12]ou dans des plans qui ne sont que de la communication reprenant des poncifs obsolètes véritables rustines éculées[13], le tourisme de montagne continue sa route entre gémissements sur la fermeture des remontées mécaniques en 2020/2021 et demandes de soutiens permanents tels des abandonnés de territoires miséreux, mais qui rechignent à reverser le FPIC (Fonds de Péréquation Intercommunal et Communal)[14] (Appel de Moutiers 28 septembre 2017)[15].
Entre les grands manitous du financement public usant de faux prétextes pour l’intérêt général[16], les enragés du béton qui profitent des errements des premiers, des irréductibles inventeurs des rustines obsolètes du siècle dernier et les impressionnistes du marketing… la montagne française est bien partie pour s’orienter vers une transition qui ne soit ni raisonnée, ni raisonnable[17].
Mais si Knock et Coué avaient raison… les stations seraient alors prises d’assaut et feraient le plein cet hiver.
Mais alors, où mettrions-nous tous ces skieurs dont le nombre évoqué dépasse largement les capacités d’hébergements actuelles (2,4 millions de lits) ?
Vite un nouveau plan d’urgence de constructions pour tous ces nouveaux clients…qui ne viendront pas.
Publié le 19 décembre 2021
24 février 2022
Et maintenant en pleine saison il y aurait 13% des français qui partiraient à la montagne l'hiver …